On ne peut évidemment plus l’ignorer (sauf chez les Trumpistes) : la planète subit actuellement de plein fouet l’impact de notre soif numérique. Entre les serveurs qui tournent jour et nuit, les flux de données qui explosent, et les services qui se multiplient, l’empreinte écologique de l’informatique est devenue un sujet incontournable. Selon un rapport récent de l’International Energy Agency (IEA), les data centers représenteraient ~1 % de la consommation électrique mondiale.
Du coup, la question n’est plus « Est-ce qu’on doit s’y mettre ? », mais « Comment rendre notre SI plus durable, plus sobre et plus intelligent ? ».
Et si on adoptait des pratiques d’ingénierie logicielle durable ?
Le code, c’est la base de tout. Alors si on veut réduire la consommation d’un système, autant commencer par lui éviter des tonnes de calculs inutiles ou de requêtes redondantes.
Par exemple, un développeur consciencieux va réfléchir à la taille des fichiers qu’il envoie, au nombre de dépendances qu’il importe, ou encore à la façon dont les applis communiquent entre elles. Moins de boucles, moins d’appels synchrones, moins de duplication… Et à l’arrivée, non seulement le logiciel tourne plus vite, mais il nécessite aussi moins de ressources pour fonctionner.
(Petit bonus : un code propre et léger se maintient plus facilement, et ça, c’est tout bénéf pour votre équipe IT…)
Auditer son SI et ses infrastructures pour rationaliser et optimiser
Autre étape inévitable : voir ce qu’il se passe réellement sous le capot.
Parce qu’entre l’appli hébergée en local qu’on a oubliée depuis deux ans, les serveurs virtualisés qui dorment à 10 % de charge et les multiples environnements de test plus ou moins délaissés, on a vite fait de dépenser de l’énergie pour…
…pas grand-chose.
- Cartographie : dressez une vue d’ensemble (applications, bases de données, flux réseau, serveurs physiques et virtuels). Ça permet d’y voir plus clair et de pointer du doigt les zones de gaspillage.
- Analyse et consolidation : quand on réalise qu’on a trois serveurs qui tournent pour rien, ou qu’une appli obsolète continue de pomper de la bande passante, on agit : on ferme, on fusionne, on modernise.
- Monitoring : on met en place des outils de supervision pour détecter en temps réel les pics anormaux ou les services qui bossent dans le vide.
La clé, c’est de ne pas se contenter d’une belle action coup de poing. Il faut instiller une logique continue d’optimisation.
On identifie, on ajuste, on mesure, et on recommence.
Et si vous voulez aller plus loin sur ce sujet, dans cet article, un consultant partage son retour d’expérience sur l’audit d’infrastructure.
Sensibiliser les équipes aux enjeux de la durabilité numérique et de la gouvernance des données
Un SI plus green, ce n’est pas juste l’histoire de l’équipe tech. Ça implique toute l’organisation, des développeurs aux métiers, en passant par la direction.
Chacun doit comprendre ce qu’est la « sobriété numérique » et pourquoi c’est très important.
Ça peut prendre la forme de petites sessions de formation, de workshops interactifs, voire de challenges internes (« Qui va réduire le plus d’appels API inutiles dans son appli en une semaine ? »).
L’idée, c’est de créer un mouvement collectif.
Et puis, on ne parle pas seulement d’énergie : la gouvernance des données fait partie intégrante de la démarche. À quoi bon stocker des téraoctets d’historiques vieux de dix ans, si personne ne les consulte jamais ? Mieux vaut archiver, voire supprimer, pour réduire la masse de disques durs à entretenir.
Au passage, vous y gagnez aussi en sécurité et en conformité, parce que moins de données, c’est moins de risques de fuite ou de violation RGPD. Simple mais imparable…
Mesurer et améliorer en continu son impact environnemental
On l’entend souvent : « Ce qui ne se mesure pas ne s’améliore pas. » Pour la durabilité numérique, c’est pareil.
Sans indicateurs, difficile de savoir si on a réellement économisé de l’énergie ou si c’est juste une impression.
On peut mettre en place des tableaux de bord qui affichent la consommation de chaque environnement, la charge processeur moyenne, ou encore la durée moyenne des tâches critiques. Et surtout, on agit sur ces indicateurs dans une logique d’amélioration continue :
- Identifier les points faibles (un batch nocturne trop long, une appli qui surcharge le CPU).
- Corriger par de l’optimisation de code, du redimensionnement d’infrastructure, ou de la suppression de fonctionnalités inutilisées.
- Vérifier si l’indicateur s’améliore et, le cas échéant, fixer un nouvel objectif.
Cette boucle vertueuse permet de garder le cap sur la sobriété. Et si on se rend compte qu’on a des marges de progression encore plus grandes, tant mieux.
Prioriser les fournisseurs cloud écoresponsables et optimiser les workloads
Dernier point, mais pas des moindres : l’hébergement.
Les plus gros data centers appartiennent à des géants du cloud (AWS, Azure, Google Cloud), et beaucoup de ces fournisseurs s’engagent, non sans difficultés et effets d’annonces, dans des programmes d’énergies renouvelables ou de neutralité carbone.
Autant faire la différence en choisissant un partenaire qui limite autant que possible son empreinte.
Cela dit, ce n’est pas suffisant de juste dire « je suis chez un hébergeur vert ». Il faut aussi réfléchir à la façon dont on consomme ces ressources :
- Ne pas allouer 10 vCPU quand 2 suffisent : on adapte la taille de nos instances.
- Programmer des périodes de veille : si un service n’est actif que le jour, on peut réduire la voilure la nuit.
- Répartir les charges : un job intensif peut être décalé en heures creuses pour mieux utiliser l’énergie disponible.
Chaque ajustement compte.
À la clé, un SI plus flexible, plus rentable, et plus responsable.
La durabilité numérique, une quête de cohérence
La durabilité numérique, ce n’est pas un truc bidon pour faire joli sur le rapport RSE. C’est une vraie démarche, une quête de cohérence entre l’explosion du numérique et la nécessité de préserver nos ressources. De l’éco-conception logicielle à l’audit régulier, de la sensibilisation interne au choix d’un hébergement écoresponsable, il existe mille façons de rendre son SI plus sobre.
Et si on s’y met tous, on peut réellement changer la donne : moins de gaspillage, plus de performances, et une empreinte qui cesse de s’alourdir. Bref, un pacte gagnant-gagnant pour l’entreprise… et pour la planète !